Teilhard de Chardin
Son influence
« L’Amour est la plus universelle, la plus formidable, et la plus mystérieuse des énergies cosmiques » (Teilhard, Sur l’Amour, 1967 p. 7). Cette citation nous indique à elle seule toute l’influence que peut encore avoir Teilhard de nos jours. Pour lui l’Amour est une forme d’énergie. Une forme d’énergie que la science saura mesurer peut-être un jour. Pour lui, cet Amour est une énergie qui nous vient d’ailleurs, d’un autre monde, de l’avant Big Bang. Par cette conceptualisation, Teilhard modernise l’idée maîtresse de la philosophie de Jésus : «Aimez-vous les uns les autres». Ce rapprochement n’est pas surprenant, diriez-vous, puisqu’il était croyant. Mais ce qui est remarquable, c’est que Teilhard ne nie rien de la science, alors qu’à son époque l’Église refusait le modernisme.
Il a fait de la synthèse entre le christianisme et la connaissance scientifique moderne l’objet constant de son étude et de sa réflexion. Il réussit cette réconciliation des temps modernes comme l’a fait saint Thomas à son époque entre la philosophie et la théologie, entre la foi et la raison. Cette réconciliation amplifie le Phénomène chrétien devenu à partir des siècles des Lumières autant une réalité religieuse que laïque. Le Phénomène chrétien est à l’origine des droits de l’Homme. L’égalité entre tous les êtres humains, la fraternité, la liberté de choix, la promotion de la femme, la justice sociale, la non-violence, la séparation des pouvoirs spirituel et temporel sont des éléments de la tradition chrétienne que nous retrouvons à l’origine de nos institutions.
De plus, l’optimisme de Teilhard demeure une source d’inspiration. Voici quelques citations à ce sujet :
« Si le progrès est un mythe, c’est-à-dire si devant le travail nous pouvons dire : à quoi bon? Notre effort retombe, entraînant dans sa chute, puisque nous la sommes, toute l’Évolution. Il n’y a pas, quoi qu’on dise, « d’énergie du désespoir ». Ce que ces mots signifient, au vrai, c’est un paroxysme d’espérance aux abois. Toute énergie consciente est, comme l’amour (et parce qu’amour) à base d’espoir.
[…]
Optimisme ou pessimisme absolus. Et entre les deux, aucune solution moyenne, parce que par nature le Progrès est tout ou rien. Deux directions, et deux directions seulement, l’une vers le haut, l’autre vers le bas, sans possibilité de rester accroché à mi-chemin.
[…]
Pour fixer le choix de l’Homme, dans son pari fameux, Pascal pipait les dés par l’appât d’un tout à gagner. Ici quand l’un des deux termes de l’alternative est lesté par la logique, et en quelque façon par les promesses, d’un Monde tout entier, peut-on encore parler d’un simple jeu de chances, et avons-nous le droit d’hésiter? » (Teilhard, Le Phénomène humain, 1955, p. 232 et 233)
L’Évolution se poursuit
Comme l’a prophétisé Teilhard, l’Évolution se poursuit. Voici un bel exemple très bien démontré par Mathieu Ricard qui, dans la préface de son dernier livre Plaidoyer pour l’altruisme, écrit:
« Mon expérience s’est donc constituée au confluent de deux grandes influences, celle de la sagesse bouddhiste de l’Orient et celle des sciences occidentales » (Ricard, 2013 p. 12)
Ce rapprochement Orient – Occident se situe bien dans la convergence pressentie par notre ami Teilhard.
Si Teilhard était parmi nous aujourd’hui, il se réjouirait de voir se développer les moyens de communication. Il serait évidemment préoccupé par l’écologie. Mais étant un grand optimiste, il se mettrait sans doute à la recherche de solutions et n’agirait pas comme contestataire.
Quelques grands penseurs viennent en appui au Phénomène humain, du moins en partie, et me réconforte dans mon choix de Teilhard comme maître à penser en spiritualité. Nous verrons comment se manifeste cet appui dans les pages suivantes.
(page révisée le 6 décembre, 2019)